Ballade réalisées dans le cadre du projet Entre le ciel et la terre.
J’ai repéré sur les images satellites une forêt où il y a apparemment des rochers de grès et du sable, un peu comme dans la forêt de Fontainebleau (ce n’est qu’à quelques kilomètres de là ). La forêt est proche d’une petite ville : Beauvais (dans le Gâtinais). On en parle pas mal sur les sites dédiés à l’escalade dans la région. J’y cherche un paysage nouveau et surtout un lieu pour prendre un peu plus contact avec la forêt.
Sur la route, avant les forêts il y une grande série de champs qui s’étendent à perte de vue. Il y fait très beau, le ciel est très bleu. Au loin dans les nuages : les bois. Le ciel vire soudainement au blanc. Je me rapproche de ce mur.
Après quelques minutes j’arrive là ou j’ai prévu de laisser la voiture. Je suis pressé (j’ai rendez-vous avec Camille des relations publiques du théâtre dans une heure), je vais devoir aller vite et faire la balade au pas de course. Ce qui sera très facile parce que j’aime courir entre les rochers. Il un car de la gendarmerie devant moi. Nous nous garons presque côte à côte. En descendant je demande au conducteur si je peux aller me promener normalement, il me répond en souriant que oui. Le bas-côté est bondé de cars. La forêt est pleine de gendarmes en tenue de camouflage. Encore une chose que je n’avais pas prévue.
Ils sont concentrés à l’entrée de la forêt. Ils me tournent presque tous le dos. Ils sont en train d’étudier des cartes, j’ai l’impression que c’est la même que moi… Ont-ils des images satellites tirées de Google Maps aussi ? Je n’ai pas le temps de m’attarder si je veux faire mon tour. Je me lance dans la course, je grimpe sur la première colline à droite, la pente est raide.
Tout est baigné dans une espèce de nuage, on n’y voit pas à cinquante mètres. Cela sent très bon. Je vais assez vite, je m’appuie d’une main sur les pierres, de l’autre je tiens l’appareil photo. Je fais une pause toutes les trois ou quatre minutes pour jeter un oeil au plan histoire de ne pas me perdre. Je susi content de fair ece parcours à cetet vitesse. j’ai le coeur qui bat fort. Je respire profondément.
Le paysage est très différent de tout ce que j’ai vu. il est impossible de creuser ici. même le type d’intervention que j’ai planifiée dans le paysage est impraticable ici. la forêt part dans tous les sens, le sol n’est pas plat sur plus de deux mètres carrés. Il y a quelque chose d’intéressant à penser, je ne sais pas si je reviendrais dessus alors je le note ici. Quels peuvent être les liens entre une expérience artistique plastique, esthétique et une course comme celle que je fais. Est-ce que cela serait possible de proposer une course à un public. Que cela soit l’oeuvre. une sorte de randonnée où l’on le jeu et l’expérience sont une performance. Ce n’est pas l’artiste qui la représente mais chacun qui la vit.
Je m’enfonce dans la forêt. Je m’arrête. Qu’est ce que je vais mettre en oeuvre après cette création pour poursuivre ce rapport à la nature ? l’histoire s’écrit depuis un moment. Le paysage s’est emparé de mes films. voilà qu’il s’empare de moi encore plus. et ensuite ? ici, au contacte de cette pierre, j’ai envie de la déplacer, pas de la sculpter ni de la modifier. Pour moi ces formes sont finies. Chaque élément ici pourrait être dans sa forme définitive dans un projet plastique. J’ai envie d’affirmer cette matière, ces couleurs naturelles. J’ai envie d’exploiter la magie de cette force naturelle.
Il y a une pierre sur le site d’Etiolles. J’aimerais déplacer cette pierre. je pense que je vais essayer de lui donner une place importante dans l’arrangement que je prépare. Comme sur ces images au dessus, elle a une force particulière. Elle a une importance singulière dans le paysage où elle se trouve. Ici chaque élément fait partie de l’harmonie, on peut en retire un certain nombre sans pour autant destructurer l’impression qui se dégage de l’harmonie naturelle des formes. plus on retire d’éléments, plus ce sera l’homme qui sera visible. Parce qu’il est impossible de les retirer sans laisser de traces. Je crois que c’est ce que j’écris dans mon projet de creuser.
En descendant des amas rocheux je reviens dans une forêt plus traditionnelle. Les arbres sont clairs et le jeu de lumière fait presque briller les roux du sol. En revoyant ces images je pense à mon travail sur Van Gogh ou de façon critique et cynique je réduisais ses tableaux à des suites de couleurs. Ici je verrais une installation repensant cette vision des bois pars une réduction des couleurs. Cela serait beaucoup plus naà¯f que dans le travail que j’ai cité. Imaginez une installation juxtaposant des accumulations cubiques (plusieurs cubes des matériaux bruts taillés dégageant leurs essences) : un cube de feuilles, un cube de fougères séchées, un cube de pierre taillée, un cube de branches d’arbres, un cube de troncs, un cube de sable, un cube de terre, un cube de mousse.
Au sortir des bois clairs je retombe sur un sentier. Je retrouve le sable qui se cachait jusqu’à présent de la surface du sol. Il faudrait que je retourne à Fontainebleau voir parce que j’ai une merveilleuse impression ici et je me demande si cela n’est pas plus beau. Est-ce plus entretenu ? Est-ce que la végétation est moins dense ? Je ne sais pas vraiment. Je repasse vers les gendarmes. Cette fois-ci je m’approche d’eux pour leur demander si cela ne les dérange pas que je les prenne en photo – non, sans problème, cela les amuse. J’ai l’impression qu’ils n’ont pas bougé depuis tout à l’heure. je ne les ai pas entendus. j’ai eu l’impression d’être seul… C’est la dernière image que je fais ici.
Originalement posté sur le blog dédié au projet Entre le ciel et la terre : Evry-Essonne . Entre le ciel et la terre, résidence de création au Théâtre de l’Agora, scène nationale d’Evry et de l’Essonne / festival siana 2007.Théâtre de l’agora. Entre le ciel et la terre, du 14 au 31 mars.