Ballade réalisées dans le cadre du projet Entre le ciel et la terre.
Les Quarante-cinq Arpents, la clef de St-Pierre, la ferme Varâtre, le futur carré Sénart…
Nous sortons de la nationale 104, la francilienne, vers Villepècle mais nous restons sur la D402E1 pour atteindre un coin que j’ai repéré sur les cartes : une espèce de structure qui met en scène ce qui semble être un immense bassin d’eau entouré de champs. Il y a un grand bâtiment en construction à proximité. Peut-être une usine où un centre commercial. J’ai assez envie d’y aller parce que cette ligne d’eau m’intrigue.
La route dessine en amont de notre but une portion de cercle parfaite. C’est étonnant sur les cartes et les images satellites. Qu’est ce que cela veut dire ? Pourquoi ? A cet endroit la route croise la voie royale. Nous ne nous arrêtons pas là , nous allons directement à la ferme Varâtre (en bordure du bois de Rapoil) où nous nous garons.
Le chemin de terre me parait plus court que ce que j’avais prévu, il s’arrête au bord de la ferme. Une installation est apparue, le paysage est complètement modifié : devant nous ne se dressent pas des champs mais un pont avec une route bordée d’arbustes récemment plantés… il n’y a pas de lien avec la ferme, nous arrivons dans le jardin qui borde la route. Nous y arrivons perpendiculairement.
En avançant à pieds vers la route nous découvrons qu’elle borde un immense bassin, celui vers lequel nous allions peut-être, mais il aurait du se trouver à plusieurs centaines de mètres de là ( ~700m). Tous les champs on étés comblés par du paysagisme approximatif. Que fait ce bassin là ? Ils l’ont déplacé ? A quoi sert-il ?
Le bassin doit faire quelque chose comme 650 mètres de long pour peut-être 20 de large. Il n’est pas profond peut-être un mètre. Il est en contrebas de la route qui le borde, route qui fait environ un kilomètre et demi… la pente autour du bassin est assez prononcée, elle est couverte d’herbe. Nous allons au bord… c’est intriguant.. Des bâtiments sont en construction vers la route sur notre gauche, en bas du bassin. Nous faisons le tour par le haut en allant vers la voie royale. Il y a une maison devant le bois, pas très loin de la ferme. La ferme a l’air d’avoir été ravalée depuis l’arrivée du bassin, mais cette maison et ses caravanes jure avec le paysage maintenant. Il y a un chantier à une cinquantaine de mètres d’elles. Ils vont se retrouver encerclés. Il apparaît de plus en plus que ce bassin est une décoration et qu’il a été ajouté au premier que je voulais voir.
Arrivés au bout, nous nous retournons pour voir le bassin dans sa perspective, le manque d’échelle humaine ne nous permet pas très bien de sentir les dimensions extraordinaires de l’ouvrage. J’imagine creuser là à la pointe, de tailler dans la terre en pente et de mettre en scène mon prélèvement et ces travaux minuscules face à cette situation dérisoire d’un paysage banalisé. J’imagine faire mon trou ici et de pousser un flotteur sur l’eau, de construire peut-être un radeau et d’y entretenir un feu.
Ce paysage est très symbolique. On pourrait se croire dans le futur décor d’un téléfilm de science fiction, on y expose un paysage maitrisé et neutralisé, asservi à l’industrie et à la consommation où la nature ne peut qu’être le lieu de la détente accordée dans les espaces régulés de la société.
Il y a quelque chose de presque religieux ici, c’est très bizarre, je pense à la pyramide avec l’oeil qui la surplombe, je pense à une société très organisée qui s’adonne à la détente en famille ici. J’imagine les pelouses bondées dans le conformisme.
Nous arrivons à la voie royale, elle a été refaite, elle est bordée d’arbres peints en blanc. Nous voyons au loin un vélo… La campagne semble infinie, on n’imagine pas de fin à cette route, ni d’un côté, ni de l’autre. C’est un paysage que je trouve assez dur. Et la décoration pourrait faire penser à un western… Ou est le ranch ?
Nous revenons vers le centre du bassin de l’autre côté, pour essayer de trouver la route qui mènerait au second bassin. Je suis attiré par un tas de terre au milieu d’un champ. Le dernier. Nous traversons la terre retournée.
Nous arrivons sur les buttes qui entourent un nouveau chantier. Il ya des traces de fondations entamées, les dessins sont apparents, le sol préfigure l’installation d’un bâtiment. Mais on est mardi et personne ne travaille ? Il y a des trous fraîchement creusés.
Ils pourraient être de taille humaine. On pourrait penser à un cimetière creusé en toute hâte qui attendrait que l’on vienne y mettre les corps…. En tout cas c’est la fin du champ.
Nous reprenons la route. Nous trouvons ce qui reste du chemin qui amenait au bassin que j’avais repéré. Il en reste quelque chose comme cent mètres. Il est bordé par des arbres fruitiers. Le reste d’une grande exploitation sur laquelle un bâtiment est venu se préparer. Au bout il y a des montagnes de terre, un tracteur qui les déplace, de la boue…
Nous traversons tous ces chantiers pour arriver au second bassin. Il y a sur le chemin de drôles d’installations, certainement des tentavies d’aménagement apparement veines. Il ne reste que des traces de ce qui était visible sur les images satelites. Etrange territoire qu’on format pour le bien-être apparent – superficiel.
Nous sommes passés devant un cinéma Gaumont, un magasin H&M et nous arrivons à un Centre commercial carrefour. Nous sommes au milieu d’une future immense zone commerciale… Nous venons d’un grand centre commercial à 15 km de là . Ils en construisent un autre ici.
Le bassin est bien là où il est sur mes documents (pas d’autres images, c’est le même!). Ils en ont construit un autre depuis. Ce paysage se transforme, il ‘vit’ pour le moment au rythme des camions et des ouvriers qui y travaillent. Le centre commercial à l’air d’être ouvert… c’est entre deux. Je suis assez touché de voir ce qui s’est passé ici. Le signe que j’ai perçu au départ m’a amené à me retrouver sur un paysage en train d’être rasé.
Mais quel paysage c’était ? Quelles cultures ? J’ai vu du maà¯s. Des céréales… Avons-nous besoin d’autant de céréales ? bien sur que non. C’est aussi une industrialisation de la culture. Quelque part toutes ces céréales étaient une étape avant ces centres commerciaux. Ce paysage a commencé à mourir ou à se désertifier au moment où les terres n’ont plus été cultivées pour les besoins de ceux qui y habitaient mais pour des raisons commerciales extérieures à la vie de cette province. Quand la pensée n’était plus liée à la terre mais au produit, à l’argent. Argent qui sera dépénsé.ici. Maintenant on récoltera des euros en plantant du désir. On ne nourrit plus, on dessèche. Du local au global, c’est la carte ce qui était qui m’a ramené ici.
les images de la balade au lieu saint
la carte du trajet sur Google Earth
Originalement posté sur le blog dédié au projet Entre le ciel et la terre : Evry-Essonne . Entre le ciel et la terre, résidence de création au Théâtre de l’Agora, scène nationale d’Evry et de l’Essonne / festival siana 2007.Théâtre de l’agora. Entre le ciel et la terre, du 14 au 31 mars.