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Posté le 9 février 2007 dans au fil des projets, Entre le ciel et la terre -> lien permanent
Troisième Balade, Propriété Privée…

Ballade réalisées dans le cadre du projet Entre le ciel et la terre.

Quelques pas de plus…

Aujourd’hui je me suis levé un peu en retard, j’avais prévu de venir faire cette balade très tôt. je voulais arriver avant le lever du soleil.
J’ai prévu de visiter la campagne proche d’Evry. J’ai repéré un endroit par lequel je suis déjà  passé plusieurs fois. je suis assez attiré par ce décor. Vu du ciel, la terre a l’air belle. Il y a deux bois que j’ai envie de visiter. Le premier est minuscule et le second plus grand. Ils sont assez proche de la route (D26), au sud-ouest de Lisses. J’ai repéré cet endroit sur les cartes. je suis fasciné par les formes et les couleurs des champs tels qu’ils apparaissent sur Google Earth.

20070209 - balade des Closeaux - Google Earth avec trajet

Le chemin clair est celui que j’ai dessiné avant la balade, en prévision de ma progression dans le paysage. le plus foncé c’est celui que j’ai effectivement parcouru. Est-ce que cela serait possible de faire mon trou quelque part par là  ? Je pars avec l’envie d’écrire dans le paysage. Faire moi aussi un petit point dans le décor qui jouerait avec l’ensemble des formes.

les closeaux - carte ign et notes

J’ai posé sur une carte et une image satellite les zones et les idées…Je les porte avec moi dans une pochette en plastique, peut-être que cela me servira pour prendre des notes pendant la balade. Ce sont des éléments qui me serviront dans l’exposition. Je suis à  la recherche d’un trésor, un endroit où je viendrais travailler, où je concentrerais mon énergie durant quelque jours.

les closeaux - image satellite et chemins

J’explore le rapport que j’ai avec les cartes, avec le paysage, j’essaie de lier les désirs qui se dessinent lorsque je suis chez moi à  regarder et imaginer et lorsque je suis sur place à  respirer et marcher en observant toutes les manifestations de la lumière sur les éléments.

balade au Nord-Est d'Echarcon - 005 balade au Nord-Est d'Echarcon - 006

Je suis parti trop tard alors je tombe directement dans les embouteillages et j’assiste impuissant au lever du jour. J’aurais aimé être sur le début de ma marche et voir petit à  petit apparaitre les arbres, les champs, les chemins, les flaques… J’ai vu les champs depuis la fenêtre de la voiture il y a quelques semaines. Mais il ne fait pas le même temps (il faisait très très gris) et comme il est encore tôt je vais surement pouvoir profiter un moment du décor avec le ciel dégagé… et bleu.

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D’un côté de la départementale il y a Echarcon, de l’autre les champs. La ville gagne sur les quelques champs qu’il restait au bord de la route. Ils apparaissent sur ma carte et sur les images satellites mais ici c’est un chantier, une extension de l’urbain en forme de lotissement. Il y a beaucoup de circulation. les maisons ne sont qu’à  une dizaine de mètres de la route.

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Je fais partie de ceux qui imagine naà¯vement que les routes s’imposent au paysage et qu’elles viennent couper les propriétés et s’accoler aux maisons. Mais là  je vois bien que c’est l’homme qui se projette – ou qui projette les autres – sur chaque utilisable. Qu’est ce qui protège les champs d’en face où je vais aller ? La propriété privée ? Ici c’en était certainement une aussi. Qu’est ce qui a eu raison de ces champs ? l’argent ? le temps ? Qu’est ce que je n’aime pas là  ? C’est la forme que cela a, les maisons se ressemblent toutes, elle sont collées les unes aux autres et l’initiative ressemble peut-être trop à  une manipulation immobilière. Est-ce qu’il sera agréable de vivre ici ? je le leur souhaite. Mais le champ cultivé était déjà  une conquête de l’homme sur la nature car il avait dompté le sauvage à  l’abandon pour le capitaliser.

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Au loin il y a une usine. Elle fume.
Je me retourne vers le chemin qui doit me guider vers le premier bois. Là  où j’avais prévu de passer en fait n’est plus (où n’a jamais été) un chemin, c’est le limite entre deux cultures. La route précédente était fermée au public. J’avance sur cette route de terre. Une voiture arrive au loin. certainement un des habitants du coin. On se croirait à  des centaines de kilomètres de la prochaine ville. La voiture me croise, on échange un regard, je souris et je dis bonjour. la voiture ne s’arrête pas, le bonjour que l’on m’a renvoyé était plus que ferme et terne. Genre : qu’est ce qu’il fout là  celui-là  ? La lumière est magnifique. elle reste hivernale : elle n’est pas très chaude mais elle est forte, elle dessine bien les détails de chaque forme. J’arrive à  un croisement. Sur ma gauche un chemin mène à  une petite colline. Elle est fermée, c’est une propriété privée. Dans le s bois au loin je devine une tour… un observatoire peut-être. C’est bien trop grand pour être une tour de chasse.

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je dois aller sur la droite. Là  aussi la route est fermée. C’est aussi une propriété privée. Je m’y engage, je ne risque rien si ce n’est de rencontrer les agriculteurs, ce qui me ferait plutôt plaisir. Je n’ai pas l’intention de violer leur intimité ni de pénétrer chez eux… je vais juste faire le tour de leurs champs jusqu’à  la forêt. Le chemin est bordé sur la droite d’une haie d’arbres et d’arbustes. Cette haie projette le chemine dans l’ombre. Il y fait bon. J’avance. le bois vers lequel je vais, le petit est à  ma gauche. cela sent bon. J’essaie de ne pas glisser, il y a beaucoup de boue.

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Je ne sais pas quelle culture borde le chemin. J’ai beaucoup de plaisir à  être là , il est encore tôt. je n’entends plus la route. le chant des oiseaux pointe. Les corbeaux qui se cachaient dans les branche s’envolent un à  un à  mon passage. Je pourrais faire des milliers de photos pour retenir tout ce que je vois, amis c’est impossible qu’elles rendent ce qui était. même en décrivant je ne peux pas vous faire partager le plaisir que j’ai. Je peux simplement en rendre compte. Mon gps tourne. Il marque. Mais je peux vous dire que c’est le dernier de mes soucis ici. J’aimerais vous transporter dans cet instant car c’est ça que j’aimerais partager. C’est seulement cela qui devrait être important : le bien-être profonde, le lacher-prise, le dégagement des neurones.

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Il y a un abris construit de planches et de tôle entre les arbres. Il y a une gamelle avec de l’eau. Certainement pour un chien… peut-être pour d’autres animaux ? il doit y avoir des sangliers. La lumière en passant entres les arbre set les branches commence à  me chauffer el visage. Il ne fait pas très froid mais assez pour que lorsque le soleil me touche cela me fasse plaisir. Je longe maintenant le petit bois vers lequel je me dirige. Il n’y a pas de passage dans le champ et le chemin y mène, alors je fais le tour. Il y a une haie devant le bois, comme celle que j’ai à  côté de moi.

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A la sortie du chemin, lorsqu’il dessine un virage, à  ma droite se trouve une ligne creusée. Elle pointe en direction du soleil. Je reste un moment devant cette plaie. J’aime bien, cela me rappelle ce que j’ai vu il y a quelque jours que l’on construisait : les bassins (seconde balade). La ligne se dessine sur une longueur qu’il m’est impossible de deviner d’où je suis.

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Ce passage est vraiment magnifique. C’est difficile d’expliquer ce qui me plait autant ici. il y a l’immensité du paysage et le rapport entre la haie qui se dresse verticalement. Il y a le vert des cultures. Le ciel. Le dessin au sol des traces de tracteurs sur le chemin, renforcé par les flaques qui reflètent le bleu du ciel. Il y a l’air que je respire…. Tout se passe entre le ciel et la terre. Je me sens bien parce que je suis à  ma place, je me sens à  ma place. balade au Nord-Est d'Echarcon - 054 balade au Nord-Est d'Echarcon - 061

A quelques centaines de mètres une maison attire mon attention. Ses murs blanc prennent toute la lumière du soleil. J’aime le jeu de l’espace et des distances. Cela me plait beaucoup de voir cette maison petite et loin. Certainement plus que de la voir de près. Elle ne m’intéresse pas en tant que telle. Je continue la balade jusqu’à  la petite forêt. le terrain est de plus en plus glissant. Il y a des traces de sabot. ce sont des traces de sanglier. Il y a longtemps ma grand mère avait une grande propriété sur laquelle se trouvait une petite forêt. La terre a été vendue…. Je me souviens de promenades dans les bois, de la crainte de croiser un sanglier quand j’en trouvais des empreintes…

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La petite forêt s’ouvre avec un espèce de marais en contrebas. Un arbre y est tombé. Les couleurs sont magnifiques… Je rentre dans le bois. Il y a une clôture métallique. elle est ouverte. Un enclos au milieu d’un bois ? Un lieu caché ? C’est assez étrange. Je m’avance, autant la nature a l’air assez propre à  l’extérieur autant à  l’intérieur il y a des traces de passage, des objets abandonnés. Mais rien de significatif qui justifierait cette clôture. L’aurée est très belle, mais rien ne me donne envie de m’éterniser. L’usine n’est pas loin on dirait… Sur les images satellites, on devinait des chemins qui fourmillaient sous les arbres. Peut-être que ce bois était plus occupé au moment où les photos ont été prises…

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Le chemin que je comptais prendre pour rejoindre la grande forêt n’existe plus. Le champ s’est étendu jusqu’à  son voisin. Par contre les lignes à  haute tension traversent les cultures et il y a un petit chemin qui mène au moins jusqu’au premier pylône. Il traverse le champ. Il est très glissant. je n’ai jamais marché sur une boue aussi collante. La terre doit être dure dessous, ce qui expliquerait que cela soit comme ça…

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Les Pylônes sont impressionnants. Il n’y a rien dessous. Je ne sais pas si vous avez déjà  côtoyé ce genre de géant mais on peut entendre le grésillement de l’énergie qui est en mouvement. C’est dangereux. Heureusement que c’est impossible pour nous de voir les champs électriques à  l’oeil nu. Je ne vais pas rester là . Le chemin ne va pas plus loin, pour rejoindre la suite de mon parcours je vais devoir traverser le champ. Il y a des espaces entre les plantes… Une bonne centaine de mètres à  sauter d’un point à  l’autre en terrain glissant.

J’arrive au bord ‘un fossé qui longe le champ. De l’autre côté on dirait presque du gazon. Je le longe. J’arrive pas très loin de la petite maison blanche. Là  le fossé s’élargit et il y a plein de pierres… A cet endroit sur l’image satellite il y a une sorte de bassin rempli d’eau. Il a disparu… rebouché ? Le chemin aussi n’existe plus vraiment. qu’est-ce qui a fait que le coin soit remodelé ?

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J’aime assez cet endroit. J’imagine creuser là  de l’autre côté du fossé. J’imagine travailler ce paysage avec une simple entaille carrée. A quoi sert ce acrré ? A quoi sert ce trou ? c’ets une façon d’intervenir plastiquement ici, c’est une façon de m’approprier le paysage et d’en faire mon dessin. J’aime cette vue, je pourrais la peindre. j’en ramène quelques photos. Mais en faisant cela je touche à  peine ce qui me plait ici. Si j’y creusais un trou, j’y passerais du temps, j’écrirais une relation avec ce lieu. En faisant des efforts ici, en suant en poussant la terre, en voyant ce paysage s’inscrire en moi dans mon activité, pas comme l’objectif mais comme un élément naturel, apprivoisé… je pourrais peut être atteindre quelque chose… trouver un trésor ?

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Je continue ma marche, je longe le champ et finis par arriver sur un chemin. J’approche du grand bois. Il y a une maison là  bas. Je vois une personne de lion. Deux. Un chien. ce sont des chasseurs. Ils m’attendent.
Je m’avance vers eux. C’est assez étrange. Ils ne bougent pas. Un s’est mis à  l’écart pour ne pas croiser mon chemin, il met son fusil sur l’épaule. L’autre plus jeune se tient sur le chemin. Je m’approche. Je lui dis bonjour et je me présente. Ile me répond. « Bonjour, vous savez que vous êtes sur une propriété privée ? » Je lui réponds que oui, et l’autre rapplique en ouvrant sons fusil pour me montrer les cartouches dans le canon :  » Vous êtes perdu ? ». Je lui répond que non, que je me promène, que je prépare une exposition et que j’avais repéré le bois qui se trouve derrière eux et que j’avais envie de m’en rapprocher. » Il me dit que le garde chasse arrive, qu’on va l’attendre pour voir ce que l’on peut faire. Il me dit que c’est dangereux, qu’ils chassent le gros gibier ici et que je risque d’avoir un accident. Il tient son fusil devant lui canon ouvert pour s’assurer que j’ai bien vu les cartouches. Il se recule. Le garde chasse sort des bois accompagné d’autres chasseurs. Ils s’approchent. pendant ce temps j’échange quelques mots avec le plus jeune pour essayer de nouer quelque chose. Il m’apprend qu’ils chassent essentiellement le sanglier. Il me redit que c’est dangereux de se promener là , qu’une balle comme celles qu’ils utilisent peut parcourir huit kilomètres en ligne droite… Je pense que la route est à  peine à  un ou deux kilomètres. Ce qui veut dire que tous les automobilistes sont en danger. Mais je ne dis rien.
Le garde chasse arrive. Je lui explique que je ne me suis pas perdu, que je voulais visiter, que j’ai bravé l’interdiction d’entrer de la propriété pendant que je ne dérangerais personne à  travers champs jusqu’à  la forêt. J’explique ce que je fais. ils sont tous sceptiques – le jeune peut-être moins. Je leur dis que je suis étonné qu’il n’y ait pas de panneau qui prévienne que c’est une zone où l’on chasse. Pour sà»r si j’avais su, je ne m’y serais pas aventuré. Il me rapelle qu ec’est une propriété privée. Il m’explique qu’ils ne sont pas obligés de mettre un panneau prévenant de la chasse. Je me confonds en excuses, en leur expliquant que je n’avais pas l’intention de pénétré l’intimité de qui que ce soit mais que je suis content de cette rencontre. Ils me proposent de reprendre la direction inverse, de suivre mes pas jusqu’aux abords de la propriété. Ce que je fais. Je le salue. je me retourne et je repars vers la route à  travers champs.
Pendant toute la durée de la rencontre j’avais l’appareil photo autour du coup. Les carte set les images satellites dans les mains. J’ai pensé les photographier, mais ça aurait servi à  quoi. L’histoire je la relate ici, c’est déjà  presque trop. Je l’écris parce qu’elle est en relation sur cette aventure que j’ai entreprise.

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Je pense sur la route qu’un accident est vite arrivé. Je pense à  la propriété privée. je n’ai pas fait attention sur la carte aux limites, je ne sais à  vrai dire pas quel type de signe identifie ces zones privées sur les cartes que j’utilise. Je partais de chez moi en y pensant sans y penser, je ne voyais pas cela comme un limite mais comme l’occasion de rencontrer des gens. j’imagine que je ne suis pas le seul promeneur à  m’aventurer dans une propriété privée. C’est délicat de posséder la terre à  ce point. Je me sens bizarre un peu. C’est difficile à  expliquer, je n’aime pas ne pas avoir le droit de fouler ce paysage. Il n’est pas clôturé. Si c’était chez moi j’agirais comment ? Si je chassais il y aurait des panneaux qui préviendraient les éventuels promeneurs, comment je les accueillerais ? Peut-être sympathiquement, c’est vrai que beaucoup de promeneurs ne respectent pas grand chose. Mais je n’accepte pas plus qu’ils dégradent les forêts en général que les propriétés… Je ne sais pas comment je serais. Je ne peux pas dire qu’ils ont été sympathiques, je ne peux pas dire le contraire. Presque j’aurais aimé les suivre. Mais c’est une autre histoire.

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Je me retourne vers le paysage que je laisse. Je suis souvent collé à  la fenêtre du train ou de la voiture et j’admire ces étendues colorées et ces bois sauvages que je croise. Maintenant je sais qu’il y en a beaucoup qui me sont interdits… étrange idée.

a les images de la balade sur une propriété privée

a la carte du trajet sur Google Earth

Originalement posté sur le blog dédié au projet Entre le ciel et la terre : Evry-Essonne . Entre le ciel et la terre, résidence de création au Théâtre de l’Agora, scène nationale d’Evry et de l’Essonne / festival siana 2007.Théâtre de l’agora. Entre le ciel et la terre, du 14 au 31 mars.

 

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